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Dans la gueule du… dragon

Je ne suis pas fervente d’émissions de télé-réalité, mais Dans l’oeil du dragon a vraiment piqué ma curiosité. Si vous ne connaissez pas, les dragons sont  5 entrepreneurs ayant réussi dans le monde des affaires qui évaluent les idées ou les compagnies de personnes qui aimeraient bien avoir un investissement. Finalement, c’est 5 personnes qui jugent des idées des autres.

J’ai écouté la version anglophone Dragon’s Den. Et la version francophone me rend tout aussi mal-à-l’aise.

Les personnes se présentant devant les dragons sont des personnes qui ont une idée, parfois excellente, parfois exécrable. Mais, principalement, elles sont des personnes ayant un rêve: celui de voir leurs idées se matérialiser. Des êtres humains en quête de leurs rêves.

Les investisseurs potentiels jugent le produit offert mais également la personne devant eux. Si le candidat est arrogant, mal préparé, nerveux, les dragons n’en feront qu’une bouchée et le recracheront sans émotion. C’est ça la business non?

Le monde des affaires peut être très cruel. Une petite erreur et une personne détenant l’idée du siècle pourrait se voir détruite en mille morceaux. Et dans ce cas, elle l’est devant un grand auditoire, c’est-à-dire nous qui écoutons l’émission. L’humiliation peut être totale.

Je ne remet pas en question la bonne volonté des juges de cette émission, qui compte Gaétan Frigon et François Lambert, que certains ont pu découvrir dans Un souper presque parfait. L’idée est bonne. Et pour ceux qui verront le fruit de leur labeur mûrir et être cueilli par les dragons, cela doit être une chance inespérée. Mais je m’inquiète pour ceux qui sont rejetés.

La semaine dernière, j’ai appris qu’une candidate Allemande d’un diner presque parfait s’était suicidée suite à des méchancetés laissées sur sa page Facebook. La télé-réalité dérape parfois et je me demande ce qui arrive de ces candidats qui pensent gagner le paquet dans une émission telle que Dans l’oeil du dragon et qui reviennent bredouilles, souvent avec l’égo scrappé, les mains vides et l’estime de soi à zéro. Comment se redresser face à une humiliation publique? Et comment le public peut-il s’acharner sur des participants au point à les pousser au suicide?

Vous me direz que c’est à eux de ne pas se présenter. Mais la question demeure plus profonde. Le Québec manque désespérément d’entrepreneurs. Et ce n’est pas moi qui le dit. Est-ce qu’une émission comme celle-ci peut vraiment donner le goût de se lancer en affaires? Est-ce que les investisseurs, les juges de cette émission, prennent conscience de la dureté de leurs propos, qui frôlent parfois l’insulte gratuite?

La télé-réalité est un divertissement, certes. Mais lorsqu’il s’agit des espoirs d’une personne, souvent fracassés, est-ce que le divertissement peut être justifié? Jusqu’où peut aller la télé-réalité? Et je vous pose la question en attendant vos réponses.